Sur un campus universitaire de la banlieue de Hong Kong, un groupe d’ingénieurs conçoit des puces informatiques qui, espérons-le, seront utilisées dans la prochaine génération de téléphones intelligents fabriqués en Chine.
Patrick Yue se penche sur sa chaise dans un café du campus, portant un t-shirt de l’Université de Stanford. Il est l’ingénieur en chef et le professeur qui supervise le projet.
Son équipe de recherche conçoit des puces de communication optiques, qui utilisent la lumière plutôt que des signaux électriques pour transférer l’information. Des Puces qui sont nécessaires au fonctionnement des téléphones mobiles 5G et autres appareils connectés à Internet.
Il me parle des défis auxquels la Chine est confrontée pour développer une industrie des puces informatiques qui soit la meilleure au monde.
« En fait, je pense que les concepteurs actuels seront tout aussi importants que la fabrication. Nous n’avons pas autant d’instituts de recherche et de bases industrielles pour former les concepteurs », précise-il.
Son département est en partie financé par Huawei, le géant chinois des communications et des télécommunications qui se trouve aujourd’hui au cœur d’une tempête politique internationale.
En mai, les États-Unis ont ajouté Huawei à une liste d’entreprises avec lesquelles les entreprises américaines ne peuvent plus commercer à moins d’être titulaires d’une licence, argumentant des problèmes de sécurité.
Rivals est une campagne sur BBC news couvrant en profondeur le sujet de la lutte pour la suprématie entre les Etats-Unis et la Chine, à travers le commerce, la technologie, la défense et le soft power.
De nombreux observateurs de l’industrie craignent que la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine ne détruise la chaîne d’approvisionnement technologique mondiale.
En particulier, la Chine qui compte sur des sociétés étrangères pour s’approvisionner en puces informatiques (ou semi-conducteurs). Ces minuscules dispositifs que l’on utilise partout, de l’électronique grand public au matériel militaire.
Mr Yue déclare : « Sur le plan politique, tout peut être utilisé comme un pouvoir de négociation « . « Si ces entreprises et ces pays commencent à faire de la rétention sur la technologie, tout le monde en souffrira. D’un point de vue technologique, ce n’est pas bon « , confirme t-il.
La Chine n’a pas caché son désir de devenir autosuffisante sur le plan technologique. Le pays est à la fois le premier importateur et le premier consommateur mondial de semi-conducteurs. Mais il ne produit actuellement que 16 % des semi-conducteurs qui alimentent son boom technologique.
La Chine prévoit de produire, d’ici 2020, 40 % de tous les semi-conducteurs qu’elle utilise et 70 % d’ici à 2025, un plan ambitieux que stimule la guerre commerciale avec les États-Unis.
En mai 2018, le président chinois Xi Jinping a rencontré les principaux scientifiques et ingénieurs du pays, appelant les spécialistes à travailler à l’autonomie dans la production des technologies de base.
Cette réunion a eu lieu un mois seulement après que le gouvernement américain ait interdit aux entreprises américaines de vendre des composants à ZTE, le deuxième fabricant chinois d’équipements de réseaux de télécommunications.
L’interdiction a montré aux dirigeants chinois que le boom technologique du pays dépendait de la technologie étrangère.
En octobre dernier, le gouvernement chinois a créé un fonds de 29 milliards de dollars US (22 millions de livres sterling) pour soutenir l’industrie des semi-conducteurs afin d’aider le secteur technologique du pays à s’affranchir des technologies américaines.
« Il ne fait aucun doute que la Chine a les ingénieurs pour fabriquer des puces informatiques. La question est de savoir s’ils peuvent être compétitifs « , s’interroge Piero Scaruffi, historien de la Silicon Valley et chercheur en intelligence artificielle.
« Certes, Huawei peut développer ses propres puces et systèmes d’exploitation, et le gouvernement peut s’assurer qu’ils auront du succès en Chine. Mais Huawei et d’autres fabricants de téléphones chinois ont aussi du succès sur les marchés étrangers, et c’est une toute autre question.
Les puces et systèmes d’exploitation de Huawei seront-ils aussi compétitifs que ceux de Qualcomm et d’Android ? Très probablement pas. Au mieux, il faudra des années avant qu’ils le soient », ajoute M. Scaruffi.
M. Scaruffi estime que la Chine pourrait avoir jusqu’à 10 ans de retard sur les principaux producteurs de puces informatiques haut de gamme. La majorité des puces destinées à l’électronique haut de gamme sont fabriquées par des fonderies spécialisées comme la Taiwanese Semiconductor Manufacturing Company (TSMC). Elle produit plus de 70 % des puces conçues par des entreprises tierces.
Il est difficile de se procurer les meilleures machines indispensables à la fabrication de puces haut de gamme. « Pour commencer il faut des équipements de très haute précision. Vous avez besoin d’imprimer des traits très fins. L’équipement nécessaire pour disposer de ce type de technologie est contrôlé par un petit nombre d’entreprises dans le monde « , explique M. Yue.
Il pense que la technologie chinoise a trois ou quatre générations de retard sur des entreprises comme TSMC. La Chine n’a pas l’expérience de l’industrie pour fabriquer des puces haut de gamme, dit-il. Mais il croit que des entreprises comme Huawei sont déjà compétitives lorsqu’il s’agit de concevoir des puces.
Qu’en est-il du géant de la technologie Huawei ?
M. Yue fait valoir que Huawei essaie de reproduire les modèles commerciaux réussis d’entreprises comme Samsung, qui produit ses propres puces informatiques, plutôt que d’essayer de s’aligner sur les ambitions industrielles de Pekin.
« Vous pouvez presque les considérer comme une entreprise intégrée avec une expertise identique à celle d’Apple ou de Qualcomm « , explique M. Yue.
Li Changzhu est un employé de longue date de Huawei et préside les activités combinés de la société. Il s’est joint à l’entreprise il y a 23 ans en tant que jeune diplômé et a vue cette dernière devenir le géant international de la technologie. Il affirme que l’objectif d’entreprises comme Huawei est simplement de satisfaire les besoins des consommateurs.
» Nous sommes ouverts à l’utilisation de jeux de puces provenant d’autres fournisseurs. Chaque année, nous achetons beaucoup de puces à Qualcomm. Nous sommes ouverts à cela. Nous utilisons les meilleures pour satisfaire nos clients « , dit-il lors d’une conférence technique à Macao, une ville semi autonome du sud de la Chine.
La croissance de l’industrie des semi-conducteurs est généralement tirée par les nouvelles technologies disruptives. À la fin des années 2000, l’introduction des smartphones a stimulé la demande pour les minuscules circuits intégrés qui contrôlent tout, de la mémoire au Bluetooth et au wifi.
Mais aujourd’hui, l’ambition de la Chine de dominer des secteurs tels que l’intelligence artificielle et la 5G devrait encore accroître la demande de puces haut de gamme.
Des analystes de l’industrie comme M. Scaruffi remettent en question la capacité de la Chine à véritablement innover. « Chaque ville chinoise veut construire sa propre Silicon Valley. Elle a plus tendance à être conduite par le haut. La Silicon Valley avait l’avantage d’être très éloignée du pouvoir politique », explique M. Scaruffi.
Il croit que le succès technologique de la Chine réside dans la mise en œuvre de la technologie plutôt que dans sa création.
« Si votre mesure tient compte du nombre de personnes qui utilisent des téléphones intelligents pour faire leurs achats, la Chine gagne gros. Mais si votre mesure se base sur des prix Nobel, alors la Chine est en train de perdre gros. Bien sûr, la Chine a très bien réussi à mettre en œuvre la technologie d’une manière qui modifie radicalement la société « , dit-il.
Par Danny Vincent / BBC News
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